jeudi 25 juin 2009

La dislocation du marché de l'immobilier US (suite)

Post d'Atrios qui fait écho à une vieille idée du blogo:

Free Rent

Loan servicers just aren't equipped to handle this many foreclosures.
-Atrios 12:48

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Traduction: les administrateurs d'emprunts immobiliers ne sont pas équipés pour gérer un tel nombre d'expropriations. Le lien va vers un article expliquant que des gens ayant quitté leur maison ne sont pas expropriés car personne ne s'occupe du dossier.

C'est une thèse défendue par le Blogo depuis longtemps: le marché de l'immobilier américain ne fait pas que baisser, il se disloque. Le système (pas sympathique mais crucial) qui fait qu'un individu qui arrête de payer son emprunt se fait exproprier est complètement engorgé. Dès lors, le non-paiement n'entraîne plus de sanction.

Les problèmes sont alors bien plus préoccupants qu'une simple baisse des prix (pourtant gravissime dans les proportions actuelles). On entre peu à peu dans une situation de non-droit où les contrats ne peuvent plus être respectés. Les banques n'arrivent plus à se réapproprier assez vite les propriétés, les emprunteurs ne quittent plus les lieux. C'est déjà comme ça que se terminait la confession du journaliste du NYT qui avait sombré dans l'engrenage du subprime suite à un divorce: il attendait depuis 8 mois que la banque lui propose quelque chose mais on lui répondait qu'elle était débordée.

Toutes les ressources privées qui ont permis de gérer administrativement le boom se nourrissaient (très grassement) sur la bête. Le crash ne génère évidemment pas les mêmes profits et on ne peut compter sur le secteur privé pour en administrer les conséquences (comme les expropriations massives). L'Etat est lui trop lent dans sa réflexion: il aurait évidemment dû créer une "administration de l'immobilier" qui empêche de laisser ce marché sombrer dans l'anarchie avec une partie de l'argent qui a été donné à Wall Street. Si Obama croit que Wall Street va faire du "service public" et dépenser de l'argent (possiblement distribuable en bonus!) dans le but d'assurer la stabilité du pays, il n'a rien compris à l'histoire récente...

On est un peu comme dans une ville après une coupure d'électricité (mémoire du black-out de 24H00 à NYC en août 2003): quelqu'un défonce une vitrine et se sert dans un magasin. La police complètement débordée ne se manifeste pas. Deux, trois, puis bientôt dix autres passants vont piquer dans le magasin. On a alors le sentiment bizarre que tout peut basculer.

Le problème est qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'une coupure d'électricité mais de la faillite d'institutions critiques: Etat, Banques, médias. Pendant dix ans, elles ont laissé se créer une situation qui allait mettre à la rue des millions d'américains dans une période de temps assez courte pour risquer la cassure du marché de l'immobilier. Il n'est donc pas question de mettre cette rupture du cadre légal sur le dos des citoyens. Elle a d'ailleurs l'avantage d'éviter qu'une partie de la population se retrouve dans des tentes de fortune alors que des millions de maisons sont vides (le squattage est une autre solution que "la nature" a trouvé contre ce problème). Déterminer jusqu'où ces dérèglements peuvent aller et quelles politiques publiques peuvent en atténuer les effets est la difficile tâche d'Obama. Encore faut-il qu'il se pose la question assez tôt, occupé qu'il est à s'assurer que les banquiers qui ont causé ce désastre traversent la crise le plus agréablement possible.