jeudi 12 mars 2009

Les bras m'en tombent...

L'unanimité des cheerleaders...

The consensus of the 51 forecasters surveyed looks for U.S. gross domestic product to tumble at a sharp 5.3 percent annual rate in the first quarter and to decline at a 2 percent pace in the second quarter.(Reuters)
(51 économistes consultés sont unanimes pour dire que la croissance va repartir au second semestre)

La vérité c'est qu'ils n'en savent rien alors pourquoi ces incantations permanentes? Les "économistes" sont à l'économie ce que Jim Cramer est à la bourse: une pom-pom girl. Vivement qu'ils se trouvent leur Jon Stewart.

Experts: Financial crisis threatens US security

Experts: "La crise financière menace la sécurité des Etats-Unis"

Vous pouvez lire tout l'article ici.

Extrait:
"The most important effect of the financial crisis and subsequent recession may be the least tangible — a serious worldwide erosion of confidence in American competence, a confidence which previously almost carried a sense of invincibility," Richard Cooper, an international economist at Harvard University and former chairman of the National Intelligence Council, told the House Armed Services Committee.

No shit! Ceci dit "l'incompétence" a bon dos. Dit-on de Madoff qu'il était incompétent? Le pauvre Bernie ne s'y retrouvait pas avec tous ces chiffres!

Pour les Etats-Unis, c'est pareil. N'importe quel gouvernement/banque centrale honnête aurait empêché et corrigé les excès criants des années Bush. J'en veux pour preuve les chiffres délirants dans l'immobilier depuis des années qui n'ont entraîné aucune mesure correctrice alors même que les contrats qu'on faisait signer à des millions d'américains étaient évidemment frauduleux. Ces deux aveuglements simultanés face à l'évolution aberrante des prix de l'immobilier (de 35% supérieurs aux normes historiques au haut de la bulle) d'une part, et aux pratiques honteuses des banques d'autre part n'ont pas pu être le fruit du hasard. On voudrait nous faire croire que c'est un problème de compétence alors qu'il est clair que c'est un problème d'honnêteté et d'élites qui ont sacrifié l'intérêt général à leurs propres intérêts sans aucun état d'âme depuis des années. Que penser ainsi du "J'm'ai trompé" de Greenspan avec son air de droopy alors qu'il a encouragé le subprime au pire moment et qu'il a lui même appelé les américains à s'endetter à taux variables* au moment précis où tout le monde savait que lui, Greenspan, allait monter les taux? Carton plein.

Selon William McChesney Martin, le rôle d'une banque centrale est de “take away the punch bowl just when the party starts getting interesting” (retirer le bol de ponch quand la fête commence à s'échauffer). Pourquoi en 2001 la FED décide-t-elle de faire précisément l'inverse? Le 11 septembre semble être la réponse mais pourquoi une baisse des taux aussi drastique (taux à 1% pour la première fois) face à une attaque spectaculaire mais aux conséquences matérielles limitées? Pourquoi cet évènement a-t-il conduit à la perte totale de tous les repères des américains en matière de politique étrangère mais aussi de politique économique? (même si dans ce dernier cas on ne s'en apperçoit que maintenant)

* Extrait de la fiche wikipédia de Greenspan ou pourquoi la Fed est clairement l'institution qui a la responsabilité la plus importante dans la crise actuelle. Elle l'a rendue possible. Elle n'a pas agi seule ceci dit, et a été influencée par Wall Street, le gouvernement et le congrès, les uns utilisant les autres pour arriver à leurs fins. Une déclaration récente de Greenspan nous en donne d'ailleurs un aperçu: “If we tried to suppress the expansion of the subprime market, do you think that would have gone over very well with the Congress?”

In a speech in February 2004, [6] Greenspan suggested that more homeowners should consider taking out Adjustable Rate Mortgages (ARMs) where the interest rate adjusts itself to the current interest in the market.[53] The fed own funds rate was at an all-time-low of 1%. A few months after his recommendation, Greenspan began raising interest rates, in a series of rate hikes that would bring the funds rate to 5.25% about two years later.[54] A triggering factor in the 2007 subprime mortgage financial crisis is believed to be the many subprime ARMs that reset at much higher interest rates than what the borrower paid during the first few years of the mortgage.

In 2008, Greenspan expressed great frustration that his 23 February 2004 speech was used to criticize him on ARMs and the subprime mortgage crisis, and stated that he had made countervailing comments eight days after it that praised traditional fixed-rate mortgages.[55]

In that speech on February 23, 2004, Greenspan had suggested that lenders should offer to home purchasers a greater variety of "mortgage product alternatives" other than traditional fixed-rate mortgages.[56] Greenspan also praised the rise of the subprime mortgage industry and the tools which it uses to assess credit-worthiness in an April 2005 speech:

Innovation has brought about a multitude of new products, such as subprime loans and niche credit programs for immigrants. Such developments are representative of the market responses that have driven the financial services industry throughout the history of our country … With these advances in technology, lenders have taken advantage of credit-scoring models and other techniques for efficiently extending credit to a broader spectrum of consumers. … Where once more-marginal applicants would simply have been denied credit, lenders are now able to quite efficiently judge the risk posed by individual applicants and to price that risk appropriately. These improvements have led to rapid growth in subprime mortgage lending; indeed, today subprime mortgages account for roughly 10 percent of the number of all mortgages outstanding, up from just 1 or 2 percent in the early 1990s.[57]

The subprime mortgage industry collapsed in March 2007, with many of the largest lenders filing for bankruptcy protection in the face of spiraling foreclosure rates. For these reasons, Greenspan has been criticized for his role in the rise of the housing bubble and the subsequent problems in the mortgage industry,[58][59] as well as "engineering" the housing bubble itself:

It was the Federal Reserve-engineered decline in rates that inflated the housing bubble … the most troublesome aspect of the price runup is that many recent buyers are squeezing into houses that they can barely afford by taking advantage of the lower rates available from adjustable-rate mortgages. That leaves them fully exposed to rising rates. —BusinessWeek, July 19, 2004, Is A Housing Bubble About To Burst?[60]

George Soros and Warren Buffett criticized derivatives while Greenspan defended them.[61]

Jon Stewart en guerre contre NBC/CNBC/MSNBC

Jon Stewart a pris à partie CNBC la semaine dernière. L'affrontement continue cette semaine. Voici le dernier épisode:

Stupid Idiot: Jamie Dimon

Jamie Dimon, le CEO de JP Morgan, en appelle à l'arrêt de la vilification de corporate america.

“When I hear the constant vilification of corporate America, I personally don’t understand it,”
Traduction du blogo: "Quand j'entends la vilification constante de corporate America, je ne la comprends pas personnellement."

Les mots me manquent... Ce n'est pas la première fois que le Blogo prend Jamie Dimon en flagrant délit mauvaise foi aggravée ceci dit.

"Tent cities" à Sacramento

Cet article d'un "blog" du New York Times nous signale l'augmentation de la population d'un bidonville dans les environs de Sacramento (voir aussi le reportage de NBC un peu plus bas). On parlait dans la crise des années 30 des "Hoovervilles" et Atrios nous propose la dénomination de "Bushvilles" cette fois-ci.

A noter qu'une maison sur 9 est supposément vide aux Etats-Unis. Cela représente 14 millions de maisons. Inoccupées, elles vont tomber en ruine en quelques années. Les financiers justifient souvent leur rôle social (et leurs richesses) en arguant du fait qu'ils permettent une meilleure allocation du capital. L'histoire récente montre qu'elle n'est "meilleure" que dans la mesure où les banquiers en ont plus...



Le blogo se targue de porter un regard critique sur les vieux corporate media et ce post ne fera pas exception. On peut s'interroger sur l'irruption d'une telle misère sur les écrans de télé américains. On sort en effet d'une période d'indifférence totale au sort des losers dans la société américaine. Le taux délirant de gens incarcérés et la dureté du discours envers les pauvres (notamment dans le débat sur le système de santé) sont le signe d'une société réellement indifférente à la souffrance de ses éléments défavorisés*. Alors on peut se demander: pourquoi soudainement cette sensibilité compasionnelle sur NBC News? Si la misère a été complètement passée sous silence pendant trente ans, on peut sûrement en rendre compte mezza voce pendant la crise. Le reportage sur la clochardisation de certains a une vertu: il permet à tous de tout à coup s'estimer heureux de ses difficultés si elles sont moindres.

Il y a une probabilité pour que ces journalistes n'aient eu pour intention que de rendre compte d'une nouvelle réalité sociale. Ceci dit, les médias participeront tôt ou tard à des opérations destinées à maintenir l'ordre social face aux difficultés économiques en créant de la résignation ou du consentement** (comme ils l'ont fait de manière spectaculaire pour la guerre ou le TARP notamment). Vous en serez tenus au courant sur le Blogo.

* Il y a une dimension raciale à ce problème car cette indifférence s'explique sûrement en partie par l'importance des minorités ethniques parmi les plus défavorisées. Il faut donc relativiser le miracle de l'élection d'Obama et des Etats-Unis qui nous donneraient supposément "une leçon de tolérance". La réalité est aussi que les minorités aux Etats-Unis sont massivement surreprésentées dans les prisons et parmi les gens qui n'ont pas d'assurance maladie. Alors je pose la question: est-il plus important que le dirigeant d'un pays soit issu d'une minorité où que cette minorité ait le même accès aux soins que le reste de la population? Je ne veux pas minimiser l'importance de l'élection d'Obama. Elle est réelle et quel meilleur moyen pour faire avancer la condition de ces minorités défavorisées que d'avoir un président qui en est issu? Il ne faut pas cependant tout confondre comme l'ont fait beaucoup de médias français. Voter pour un métis qui a été rédacteur en chef de la Harvard Law Review et qui se pose en garant de l'ordre établi est une chose. Dépenser ses "hard earned tax dollars" pour donner une chance à des minorités défavorisées d'échapper à un avenir écrit d'avance est autre chose. Et les attaques répétées contre l'Affirmative Action et les programmes sociaux en général depuis trente ans nous présentent une amérique qui ne tend pas la main à ses minorités en souffrance mais qui les ghettoïsent impitoyablement. Donc please: plus de leçons.
** "créer du consentement" est assez proche de la formule "Manufacturing Consent" popularisée par Noam Chomsky pour que je le signale.